Robert Wyatt : De la machine molle à l’opéra comique
Robert Wyatt a été l’un des fondateurs du rock "underground" anglais avec les Pink Floyd. A la tête de Soft Machine, il a pratiquement inventé le Jazz-Rock. Il ne s’est jamais pris au sérieux et n’a jamais recherché la starisation. Il a continué à se produire en public, à enregistrer des albums malgré son handicap même si cela l’a obligé à abandonner la batterie pour se concentrer sur le chant.
- Robert Wyatt
Certes, Robert Wyatt n’est jamais passé chez Drucker ou sur TF1, mais est-ce une raison pour qu’on n’en parle pas ? Pour certains ce pourrait l’être, pour d’autres ce serait plutôt le contraire. Car Robert Wyatt est un dadaà¯ste, un communiste, un batteur de talent, un chanteur, un original. Il fait ses premières armes dans la musique dès 1963 avec Hugh Hopper (futur Soft Machine) et Daevid Allen (futur Gong). Puis ce sont les Wild Flowers avec les frères Hopper et Kevin Ayers (futur Soft Machine). Bizarrement (?) on retrouve Kevin Ayers, Wyatt, Daevid Allen et Mike Ratledge dans la première mouture d’un nouveau groupe : The Soft Machine ainsi nommé d’après un livre de l’écrivain beat américain William Burroughs (auteur du célébrissime "Le festin nu"). Dans ce groupe, il chante, il joue de la batterie. Les trois premiers opus du groupe sont à écouter absolument si vous aimez le rock et le jazz de Miles Davis, de Gil Evans ou encore la batterie d’Elvin Jones. L’aventure de Wyatt s’arrête au 4ème disque du groupe qui verra Mike Ratledge et ses hommes s’orienter vers une musique plus instrumentale et disons-le, plus ennuyeuse...
The Soft Machine
- Robert Wyatt
En 1972, il fonde Matching Mole (nom inspiré par la traduction française de Soft Machine qui signifie Machine Molle). Le groupe sort deux albums, le premier comprend une splendide ballade "Oh Caroline", le second fait un peu scandale avec sa pochette "réaliste-socialiste-maoà¯ste". En 1973, lors d’une soirée trop arrosée, il passe par la fenêtre de son appartement et atterrit 4 étages plus bas. Bilan : paralysie des deux jambes. Wyatt ne peut plus jouer de la batterie, mais il peut toujours chanter et composer et il le prouve en enregistrant "Rock Bottom", son chef d’oeuvre : disque phare, étouffé, claustrophobe, mélancolique, faussement minimaliste, planant et évocateur. Ce pourrait être le départ d’une belle carrière de chanteur, mais Wyatt reste fidèle à sa ligne de conduite. L’album suivant "Ruth is stranger than Richard" ne fait aucune concession commerciale. Il en sera de même pour les suivants. Dans les années 80, il enregistre "Biko" de Peter Gabriel, compose "Shipbuilding" pour Elvis Costello. Il adhère au Parti Communiste anglais et enregistre ses versions de "L’internationale" et de "Guantanamera", des versions décalées avec la pointe d’humour anglais indispensable.
Robert Wyatt : Shipbuilding
Après le très bel « Old Rottenhat » (1985), son nom revient sur les lèvres. Puis plus rien jusqu’en 1991. Entre temps, il enregistre avec Brian Wilson, l"™ancien compositeur et chanteur des Beach Boys. « Dondestan » (1991), « Shleep » (1997) et « Cuckooland » (2003) lui permettront d"™acquérir une tardive reconnaissance. Album après album, il finit par être considéré comme un des musiciens les plus inventifs de l"™histoire du rock. De Pascal Comelade (qui reprend avec lui « September Song » de Kurt Weill) à Paul Weller (Jam), nombreux sont les artistes qui font appel à ses talents. En 2004, il a contribué à « Medàºlla », de Bjà¶rk et joué des percussions sur "On An Island", de David Gilmour, en 2006. Robert Wyatt n’a pas fini de nous surprendre : son dernier album, Comicopera (2007), est divisé en trois actes comme un opéra comique avec une première partie chantée en espagnol !
Jacques Becker
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