Un artiste non-voyant, c’est d’abord un artiste !
Nucleus et la promotion des artistes handicapés
A Marseille, l’association Nucleus est un lieu d’expression, de promotion et de soutien aux artistes handicapés, principalement déficients visuels, bien que sa vocation et ses aspirations futures soient de travailler avec toute forme de handicap. Elle s’investit aussi dans l’initiation et la formation d’enfants et de jeunes handicapés. Son projet de création du Centre culture et handicap dédié à la culture et aux arts, devrait ouvrir en septembre 2011. Pôle de ressources et d’informations, il aura pour vocation de fédérer les structures, les associations et les appels à projet autour de la mixité ou du handicap et permettra d’accueillir des artistes en résidence. Les éléments seront alors réunis pour que s’accomplisse une des missions essentielles de la structure : favoriser les rencontres entre artistes valides et artistes handicapés de différentes nationalités dans les conditions les plus optimales.
Handimarseille : Bonjour, est-ce que vous pourriez vous présenter, et nous présenter votre association, ses axes de travail ?
Sophie Dalmon : Je suis Sophie Dalmon, je suis en charge de l’association Nucleus. Nucleus a été créée en 2002 à Londres. Sa principale mission était de regrouper des artistes, des créateurs, des personnes de différents horizons, autour de la créativité, de la culture et des arts. On a travaillé, avec des artistes professionnels et amateurs, handicapés, valides, avec des étudiants aussi. En 2003, l’association a déménagé à Marseille, où l’on s’est un peu plus orienté vers l’initiation et la formation d’enfants et de jeunes handicapés, particulièrement de déficients visuels.
Il s’agissait au départ, en tant que plasticienne, d’un intérêt personnel pour une approche différente de la matière, avec de jeunes déficients visuels. À partir de ce travail, avec les enfants et les jeunes de Marseille, on est parti à l’étranger. On a fait des correspondances et des échanges avec des jeunes déficients visuels, avec des écoles de jeunes déficients visuels de Cracovie et de Budapest. On a beaucoup travaillé sur l’auto-portrait, sur l’image de soi, etc. Ensuite, en 2007, on est parti au Maroc avec le même projet, puis en 2008 on est un peu revenu à nos premières amours ; c’est-à-dire travailler à nouveau avec des artistes professionnels handicapés. La vocation de l’association c’est également de travailler sur la mixité des nationalités, des origines, des conditions mentales, physiques ; et donc de travailler autour de rencontres d’artistes professionnels handicapés et valides, autour de rencontres d’enfants handicapés et valides, auprès des écoles ou au sein des ateliers. Cet élément est vraiment très important, pour nous.
H : Vous êtes présidente fondatrice de cette association, est-ce que vous pourriez me parler de vous, de votre parcours professionnel, de votre métier ?
S.D : Au départ je suis plasticienne. J’ai fait un cursus littéraire à Paris, puis je suis partie en Angleterre, où j’ai vécu dix ans et où je me suis initiée aux arts plastiques et visuels. L’association est donc née à cette époque.
Ensuite, c’est le retour à Marseille où mon travail de plasticienne a été un petit peu mis en stand-bye depuis quelques années, au profit de l’association. J’ai beaucoup participé aux ateliers, à la formation des enfants et des jeunes, et disons que ma réflexion de plasticienne a toujours nourri le travail que l’on faisait avec les jeunes, notamment sur l’auto-portrait. Il y a donc toujours eu un parallèle entre mon travail personnel et le travail de l’association ; même si j’espère pouvoir reprendre mon travail personnel et revenir sur le devant de la scène. Cela sera possible avec la création du Centre culture et handicap, qui sera une structure plus institutionnelle, plus pérenne, dont je pense garder la direction artistique jusqu’en 2013, avant de passer la main, et donc prendre du recul. Il y aura un nouveau directeur artistique, qui changera tous les trois ans, pour donner une nouvelle impulsion et de nouvelles directives. L’ouverture du centre est prévue en 2011.
H : Quelles sont les joies que vous retirez dans votre travail avec Nucleus ?
S.D : Les joies, c’est le travail auprès des enfants et des jeunes. C’est la découverte de deux choses, de la similitude de tous les individus, handicapés ou non, et parallèlement de la particularité de tous les individus et de ce qu’ils peuvent apporter. Avec un enfant en fauteuil, on travaille d’une façon différente, et en même temps, au bout de cinq minutes on ne voit même plus qu’il est handicapé, et on travaille juste avec l’individu. Donc, çà c’est fantastique parce que c’est vraiment une rencontre de personnes. On le ressent peut-être de façon plus forte quand a priori, il y a quelque chose d’extérieur qui vous dit : "Ah non c’est quelqu’un de différent". Çà , c’est une réelle satisfaction, c’est à dire de pouvoir échanger à un autre niveau, à un niveau vraiment humain, au delà de la première différence. Ensuite, il y a ce que les enfants ou les adultes handicapés m’ont appris, dans leur différence et au delà de la non différence... Voilà , c’est tout un univers, comme quand on rencontre une personne étrangère, qui parle une langue différente, qui a une culture différente. Si on arrive à entrer en communication, en premier il y a un échange humain, et ensuite il y a la découverte de sa culture, de sa particularité. C’est exactement pareil avec des enfants, des adultes déficients sensoriels ou handicapés moteur, ou mentaux. C’est à dire qu’en premier il y a un a priori, ensuite l’a priori tombe, et on se rencontre humainement. Il y a la découverte de la différence, de ce que l’on peut s’apporter l’un et l’autre.
H. - Et ce qui vous déplaît, ou éventuellement vous frustre, dans votre travail ?
S.D. - Les frustrations, c’est le manque de moyens, ce qui fait que l’on doit être vraiment, très polyvalents. On a une toute petite équipe et on doit faire beaucoup de travail administratif, ce qui est vraiment très loin de nos compétences de départ. C’est ainsi pour toutes les petites structures. Il y a donc, beaucoup d’administratif, beaucoup de temps passé à remplir des dossiers, à faire des demandes de subventions. Tout cet aspect administratif et logistique, qui est un métier en soi et qui demande des moyens. Donc, j’espère que les moyens vont arriver pour pouvoir déléguer cette partie-là.
Sinon, il y a peu de désagréments. Quelques déceptions parfois quand on n’a pas la coopération attendue. Quand, par exemple, on propose un projet auprès d’écoles où les enseignants ne s’emparent pas de ce qu’on leur propose, pour rebondir, l’enrichir, le faire fructifier ; quand il n’y a pas de suivi, pas de relais de la part de structures.
H : Pas d’échec dans les relations humaines que vous avez tissées, avec les jeunes ?
S.D : Pas vraiment, parce qu’en fait on propose quelque chose, on n’impose en rien. C’est-à-dire que les jeunes avec qui on a travaillé, étaient des jeunes qui voulaient travailler avec nous, qui voulaient faire l’expérience. Après, c’est vrai qu’il y a des jeunes avec qui c’est difficile, qui ont eu des réactions violentes par rapport à la pratique artistique, parce que ça a remué des choses. Par exemple, des jeunes qui sont partis, notamment quand on travaillait sur l’auto-portrait, parce que ça renvoyait vraiment à des choses fortes. Des jeunes qui se sont énervés et qui ont cassé leur auto-portrait, mais qui après sont revenus et ont repris le travail. Il y a eu des réactions fortes. Mais on ne peut pas vraiment parler d’échec, parce que c’est bien que ça remue des choses. On part toujours sur une base d’échange. Nous, on propose une accessibilité, un soutien, des moyens, des outils, de la réflexion. Mais ce n’est jamais une activité imposée.
H : Nous sommes ici, à la bibliothèque municipale de l’Alcazar, est-ce que vous pouvez nous expliquer ce qui motive votre présence ici ?
S.D : Nous sommes partenaires de l’Alcazar, avec le service Lire autrement qui est donc un service adapté. Là, on présente une installation sur le thème du Maroc et de l’Espagne, sur la rencontre des deux cultures.
Nous avons réalisé une cabine qui s’organise autour des sens. Il y a donc des créations olfactives, d’un jeune parfumeur non-voyant, du son, créé par Gilles de la Buharaye, un pianiste non-voyant également, il y a des maquettes tactiles créées par un architecte voyant, sous la directive de personnes non-voyantes. C’est donc une cabine axée sur la thématique culturelle de la rencontre méditerranéenne, qui a été créée par des artistes et des jeunes de l’Institut Arc-en ciel pour jeunes aveugles amblyopes. Il y a aussi un film sur l’histoire du flamenco et de la danse orientale, accessible en langue des signes. La cabine est installée à l’entrée de l’Alcazar ; il s’agit d’un partenariat autour de la perception sensorielle, de la Méditerranée, de la rencontre et des différentes façons de percevoir le monde.
H : Quel type de public recevez-vous ?
S.D : Le matin, on reçoit des groupes scolaires du quartier. En général, ce sont des écoles primaires, et donc il y a une découverte à travers les cinq sens. Une découverte de la langue des signes, une découverte du braille, à travers le thème de la Méditerranée, de la rencontre Maroc-Espagne, qui est un support ouvert. Notre propos, ce n’est pas de parler du handicap en tant que tel, mais à travers un projet. Là, c’était la Méditerranée, la rencontre de la Rive-Nord et de la Rive-Sud, et autour de ça, on travaille avec des jeunes et des artistes qui ont des particularités. C’est notre façon d’approcher la question du handicap par d’autres biais, pas frontalement.
H : Comment s’établit le contact avec les jeunes et les artistes avec qui vous travaillez ?
S.D : Pour l’instant, c’est nous qui démarchons beaucoup. Soit dans les instituts spécialisés, au niveau des enfants et des jeunes, soit lorsqu’on entend parler d’un artiste, d’un créateur, d’une compagnie ou de professionnels qui travaillent autour de la mixité ou du handicap. Par exemple, dans le cas de Gaël Pelletier, qui est un parfumeur non-voyant de Montpellier, on a vu un reportage sur lui ; on a trouvé que c’était intéressant, on l’a contacté et on lui a passé commande d’effluves autour du Maroc et de l’Espagne, pour les présenter dans la cabine aux cinq sens.
H : Il est écrit sur votre site : « La démarche artistique, s’appuie sur la partie saine de l’individu. » Pouvez vous nous préciser le sens de cette phrase ?
S.D : La partie saine de l’individu c’est la partie heureuse, la partie curieuse, la partie accessible, avec laquelle on peut rentrer en contact. Alors après, vous l’appelez comme vous voulez, vous l’appelez l’âme, ou la curiosité, l’envie, la pulsion de vie. Ça, c’est ce que l’on rencontre en premier chez les enfants ou chez les adultes, et c’est ce sur quoi on s’appuie, pour commencer un travail, pour parler, communiquer.
H : La déficience visuelle, est-ce le principal type de handicap avec lequel vous travaillez ?
S.D : Pour l’instant, oui. Parce que ça s’est enclenché comme ça et qu’ensuite les réseaux se sont développés plutôt dans ce domaine. Mais on a également travaillé avec des enfants infirmes moteur cérébraux (IMC) de l’institut Saint-Thys à Marseille, on a travaillé avec des jeunes sourds et malentendants de l’institut Rémusade, avec des enfants trisomiques, en collaboration avec l’association GEIST de GEIST 21. La vocation de l’association et du futur centre sera de travailler avec toute forme de handicap.
H : Quels sont, aujourd’hui, les freins à l’accès à la culture, à l’éducation et au savoir pour les personnes ayant un handicap ?
S.D : Premièrement, il y a une question d’accessibilité. Sur Marseille, par exemple, il y a très peu de salles de danse ou d’expression corporelle adaptées aux personnes à mobilité réduite. Ensuite, au niveau des artistes professionnels, il y a un problème de réseaux, aussi. C’est-à-dire que les artistes professionnels, handicapés ou en situation de handicap sont souvent cantonnés à rester dans des réseaux de personnes handicapés, des festivals pour artistes handicapés, etc. Hors, au départ, ce sont des artistes qui méritent ou qui ont envie de participer à des réseaux classiques. C’est déjà difficile pour tous les artistes, mais lorsqu’on présente un handicap, on a encore moins d’accessibilité aux réseaux classiques.
H : Vous soulevez une question sur votre site, j’aimerais que vous y répondiez : « En quoi, et comment les pratiques artistiques favorisent-elles l’épanouissement personnel, l’intégration sociale, et l’accès aux savoir des personnes handicapées, ou en difficulté ? »
S.D : Il y a plusieurs niveaux. Déjà, il y a la confiance en soi ; c’est vraiment le point essentiel, parce qu’à travers la pratique artistique, par définition, on ne demande pas de performances, il n’y a pas de modèles. L’art et la créativité c’est tout le contraire, c’est de trouver en soi quelque chose de profondément sensible, original, et personnel. Il n’y a pas de jugement dans l’art, dans la créativité. On ne va pas vous demander de faire beau ou de faire bien, ce n’est pas de l’artisanat. On n’est ni dans la performance, ni dans la productivité. Par définition, c’est un champ d’expérimentation. Lorsqu’on y entre, et lorsqu’on se prend au jeu, il va y avoir une satisfaction, une auto-satisfaction qui va amener une prise de confiance, sur laquelle on peut rebondir par la suite. Il y a quelque chose de tangible, qui part de l’auto-satisfaction. En ce sens, la pratique artistique est un levier majeur.
H : Vous dites que « la vision et la compréhension du monde naissent de l’étroite collaboration entre la raison et l’intuition ». Comment peut-on développer l’intuition à travers des pratiques artistiques ?
S.D : Qu’est-ce que l’intuition ? Il y a plein de réponses possibles. L’intuition peut être favorisée par une écoute et par une attention à ce que l’on perçoit, profondément et personnellement ; par opposition à la masse d’information, visuelle, auditive qui nous est assénée et qui sont des informations directives, en quelque sorte. L’intuition peut naître d’une meilleure concentration, ou d’une plus grande attention à ce que l’on perçoit. En ce sens, l’art peut favoriser une plus grande attention à ce que chacun perçoit. Quand, par exemple, on fait un atelier de modelage et qu’on met les enfants en condition de déficience visuelle, avec un bandeau sur les yeux, ils deviennent naturellement plus attentifs à ce qu’ils entendent, à ce qu’ils touchent. Donc ça fait naître une meilleure attention aux stimuli sensoriels. Ça fait naître des idées et donc peut-être, une pensée.
H : Certains acteurs du monde du handicap font une distinction entre pratique artistique et art-thérapie. Qu’en pensez-vous ?
S.D : Tout à fait. L’art-thérapie, c’est une discipline, codifiée, médicalisée. C’est un métier en soi. La pratique artistique ou le développement personnel médiatisé, c’est simplement donner l’accès à l’expérience. Dans l’art-thérapie, les thérapeutes vont faire une grille d’évaluation, vont tirer des conclusions etc. Nous, notre métier ce n’est pas ça. Notre métier, c’est donner l’accès à une pratique, à une expérience, donner des moyens, donner des pistes, mais en aucun cas on a la prétention ensuite d’en tirer des conclusions.
H : Peut-on parler de potentialité artistique (sensibilité, simplicité, vision épurée...) propre aux personnes handicapées ? Et dans ce sens, peut-on parler d’arts fondés sur le handicap ?
S.D : Le handicap engendre des particularités et l’art se base sur la particularité, sur ce que l’on a de proprement original. Donc une personne déficiente visuelle, par définition va être plus attentive, plus sensible au son et va peut-être développer une facilité à entendre ; une personne déficiente auditive, va être peut-être plus sensible à son rythme intérieur et aux couleurs. Mais peut-être que le point commun c’est une plus grande attention. On a travaillé avec une chorégraphe marocaine, qui elle-même a travaillé avec des jeunes déficients visuels, et elle me disait « moi quand je fais un atelier d’initiation à la danse contemporaine, avec des jeunes voyants, je mets au moins quatre, cinq jours à obtenir une concentration, à ce qu’ils arrêtent de se regarder l’un, l’autre, à ce qu’ils arrêtent de vouloir me séduire ou essayer de deviner ce que je veux. Je mets au moins trois ou quatre jours à obtenir cette concentration et cette écoute intérieure. » Parce que la danse contemporaine, c’est essayer de trouver une connexion entre ce que l’on ressent et le geste que l’on va poser dans l’espace. Et elle me dit « là, avec ces jeunes déficients visuels, la concentration et l’intimité avec eux-même a été quasiment immédiate, et ça c’était une différence fondamentale ». Alors cela ne veut pas dire que chaque personne handicapée peut être un artiste, mais cette écoute-là et cette proximité avec lui-même, qui est nécessaire à l’artiste, probablement que les enfants et les adultes en situation de handicap, l’ont de façon plus immédiate.
H : Quel est le regard porté sur votre travail, par le public en général ?
S.D : En général, les gens sont étonnés, surpris que des enfants ou des adultes handicapés, non-voyants, sourds ou handicapés moteur puissent arriver à de tels résultats. Et ça, c’est aussi notre mission, c’est-à-dire de travailler sur la longueur, passer le temps qu’il faut pour trouver les moyens adaptés à chaque forme de handicap, afin que le résultat soit à la hauteur du potentiel de départ, du potentiel créatif des enfants ou des jeunes ; détourner les difficultés, motrices ou sensorielles, trouver les solutions adaptées, pour révéler le potentiel. Quand on a travaillé sur l’auto-portrait avec des jeunes déficients visuels, mal-voyants ou non-voyants, à la sortie, les gens étaient sidérés par la ressemblance de leurs auto-portraits.
H : Est-ce qu’il y a une reconnaissance de votre travail, dans le milieu culturel et artistique ?
S.D : Ça commence... Jusqu’à présent, on a été essentiellement soutenus par des financeurs liés au handicap, alors que depuis sa création, Nucleus dit : « un artiste non-voyant, c’est d’abord un artiste, ce n’est pas d’abord un non-voyant » , ce message-là , n’a pas toujours été entendu. Maintenant, depuis deux ans, on commence à avoir des échos au niveau des partenaires financiers, au niveau des arts et de la culture. Peut-être que nous arrivons à véhiculer ce message de façon plus claire.
H : Comment vivez-vous, économiquement parlant ?
S.D : Essentiellement avec des subventions territoriales de la région, du département et de la ville. On a été soutenus, également et à plusieurs reprises, par la Fondation de France ; ainsi que par la Fondation Orange, sur le projet d’auto-portrait, avec jeunes déficients visuels. On bénéficie aussi de dons en nature, du matériel d’arts plastiques, et des dons privés. Nous sommes également, en train de solliciter des artistes de renom, notamment avec la création du centre, pour parrainer et pour appuyer un petit peu notre démarche, c’est-à-dire de présenter une mixité entre artistes handicapés et artistes valides. On a contacté quelques artistes, maintenant on attend des réponses.
H : Qu’est-ce qui a été le moteur de votre création artistique au départ ? S’agit-il d’un engagement politique au sens citoyen du terme ?
S.D : Il y a au départ, une conscience sociale, c’est certain, mais c’est aussi et surtout un véritable intérêt intellectuel et artistique, lié à une perception différente des choses, et forcément quand on perçoit le monde différemment, on le conçoit différemment. J’ai toujours eu un intérêt pour des nationalités différentes, des cultures différentes, et pour moi le handicap, d’ailleurs l’Unesco donne cette définition-là du handicap, c’est une culture différente. Le handicap est vraiment considéré, en tant que culture. C’est-à-dire, une façon de percevoir le monde différente, une façon de communiquer différente ; c’est ça une culture.
H : Parlez-nous de ce projet de création du Centre culture et handicap, dont l’ouverture est prévue en septembre 2011. Qu’est-ce qui motive la création de ce centre ?
S.D : L’idée, c’est de revenir aux origines de ce qu’était Nucleus. Au départ, on travaillait avec des artistes professionnels, venant de différents horizons. Ensuite on a beaucoup travaillé avec les enfants et les jeunes au niveau de l’initiation artistique, du développement personnel, à travers les pratiques artistiques. Là, on va poser un centre pérenne avec des locaux d’activités, notamment une salle de danse accessible aux personnes à mobilité réduite, accessible à toute forme de handicap. Il va y avoir également un appartement relais, pour pouvoir accueillir des artistes en résidence, un appartement accessible encore une fois, aux personnes à mobilité réduite. Donc, la création de ce centre, permettra de continuer à travailler sous la forme d’ateliers hebdomadaires, avec les enfants et les jeunes, mais aussi, pouvoir proposer à des artistes professionnels, pré-professionnels, ou étudiants en arts de se rencontrer, de travailler, d’avoir du matériel adapté ; que ce soit du matériel audio, avec des synthèses vocales, des matériels d’enregistrement. L’idée, c’est aussi de pouvoir favoriser des rencontres mixtes, entre artistes valides et artistes handicapés, artistes de différentes nationalités. Ce centre, spécialisé dans la culture et dans les arts, sera un pôle de ressources, d’informations, qui aura pour vocation de fédérer les structures, les associations, les appels à projet, autour de la mixité ou du handicap.
H : Merci beaucoup.
Propos recueillis par Ugo Chavarro
Voir en ligne : Association Nucleus
Vous avez trouvé cet article intéressant ou utile, votez :