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Je n’ai besoin de personne

Patricia, quarante-sept ans, adepte de la méditation, de la macrobiotique et de l’alimentation crue nous parle de sa maladie avec beaucoup de calme et de sérénité.

Pour Patricia, l’accessibilité n’est pas un problème et pourtant, tout la gêne.

Tout me gêne, je fais le minimum, le minimum de choses. Maintenant j’ai loué un fauteuil roulant parce que exceptionnellement je désire aller m’acheter des chaussures, mais c’est tout nouveau pour moi. Je n’envisageais pas jusqu’à ce jour, pourtant j’en ai besoin. Je n’envisageais pas de me mouvoir avec. Je trouve que c’est inconfortable de se mouvoir avec le fauteuil, c’est peu accessible. Maintenant, tout nouvellement, j’ai décidé occasionnellement, je m’en servirai. Quand je suis venue habiter ici, j’étais toujours avec mes cannes, la voiture, je n’étais pas trop gênée. Je montais seule avec mes cannes, mes démarches extérieures et intérieures. Puis après, j’ai commencé à être un peu plus fatiguée et j’ai dit : "J’aimerais bien qu’on me mette des rampes". Ça a été quasi impossible, c’est toujours impossible de les avoir à l’extérieur. Mais j’ai obtenu, avec l’Association des Paralysés de France, la première rampe qui est intérieure au hall d’immeuble. Grâce à elle, je suis autonome. Je suis contente d’avoir les deux marches intérieures parce que ça me fait toujours cette petite gymnastique. Maintenant, pour l’extérieur, je ne suis pas autonome. Comme il y a toujours quelqu’un qui me conduit, c’est lui qui me fait descendre les escaliers, qui me les fait monter et par la force des choses, je me suis adaptée. Je n’ai absolument pas besoin d’un fauteuil ! Mais qu’est-ce que j’en ferais ? Comment je m’en servirais ? Je ne sais pas ! C’est vrai que je vois des handicapés avec des fauteuils électriques qui se déplacent assez facilement, moi j’envisage mal. Je trouve qu’il y a des trottoirs, c’est très inaccessible, à Marseille, il me semble. Comme j’ai connu le Groupement Insertion Handicapés Physiques (GIHP) et qu’il me dépose à l’endroit où je veux aller, eh bien, c’est ce que je fais ! Quand j’ai besoin de quelque chose, il me dépose et après, il revient me chercher. Je ne me déplace pas particulièrement. Depuis les années 2000, je n’ai plus de voiture. Je me suis habituée à cette mobilité réduite.

Concernant sa maladie, elle nous raconte comment les symptômes sont apparus et ont évolué.

La sclérose en plaque est une maladie sournoise qui s’est installée avec lenteur depuis 91. Ça a été assez lent et de plus en plus rapide, maintenant. C’est très sournois, très subtil comme aggravation. Moi je m’en rends compte d’une année sur l’autre. Du coup je me dis : "Là , je pouvais le faire l’année dernière". Il n’y a que dans ces moments-là que je prends conscience que ça va moins bien. Ensuite, je m’adapte à cet inconfort permanent parce que fonctionner avec cette maladie, c’est un inconfort en permanence. Comme je vis seule, j’essaye le plus possible de me mouvoir, si possible de me muscler avec le vélo de façon à ce que l’aggravation se fasse de moins en moins dure. À l’âge de dix-huit ans, premier symptôme, une diplopie. Je vois double, brusquement. À ce moment-là , on va à l’hôpital, j’habitais Aubagne à cette époque. L’hôpital me dit, dit à ma mère - parce que j’avais quinze ans, non, dix-huit ans - donc ils disent à ma mère : "On va la mettre sous vitamines et on va voir". Effectivement, ça a suffit. La diplopie a disparu. Après, à vingt-cinq ans, névrite optique, je perds la vue de l’œil gauche en trois jours. L’ophtalmologue ne comprenait rien, il m’a fait perdre un peu de temps parce qu’il cherchait à comprendre et finalement, après, quand il a compris que j’y voyais plus du tout, il m’a envoyée à l’hôpital. Là -bas, on m’a mise sous cortisone et la vue est revenue tout de suite, à la première perfusion. Je recommençais à voir la lumière quand on me mettait une petite lumière près de l’œil, je recommençais à voir. Lentement, c’est revenu et normalement. Maintenant, j’y vois correctement. Dix ans plus tard, à trente-cinq ans, j’ai commencé à avoir des pertes d’équilibre, un pied qui raclait le sol, et petit à petit, ça s’est installé. Je ne voulais pas l’admettre, je ne voulais pas l’accepter. Je me doutais que peut-être ça serait ça, mais je ne voulais pas. Je continuais à faire ma vie malgré tout, en me disant : "C’est dans ta tête, ça passera". Après, j’étais beaucoup trop fatiguée et mon chef d’équipe m’a dit : "Patricia, occupez-vous de vous !" À ce moment-là , je me suis arrêtée, c’était en 94 et depuis, je ne travaille plus. J’ai tenté de reprendre neuf mois, avant les années 2000, pour essayer avant l’invalidité, mais c’était trop fatigant. Vivre avec cette maladie, maintenant je... je peux dire que de toute façon, c’est très inconfortable. On ne peut pas être heureux avec. On ne peut pas dire je vis bien avec. Je vis avec, point final. Je survis, quoi ! En attendant que ça en soit fini. En plus c’est très bizarre comme maladie parce que c’est fonction de chacun. Il y a des gens qui guérissent. Je parlais ce matin avec une copine qui me téléphone de loin, je ne l’ai jamais vue, cette fille, elle aussi est malade, elle est sur un fauteuil, sclérose en plaque et elle, elle va à Lourdes et depuis deux ans qu’elle y va, elle se sent mieux. Ça lui fait beaucoup de bien, elle connaît le miraculé de Lourdes, elle l’a rencontré. Donc on peut savoir qu’il y a des gens qui guérissent. Spontanément. C’est rare mais ça existe. Je connais des gens autres que ce miraculé, je connais une femme qui a guéri aussi, qui marche très bien maintenant alors qu’elle marchait très mal. C’est un peu fonction de la vie de chacun. Je crois que si dans notre vie il arrive un bonheur immense, le corps se régénère...

Le comportement et le regard des autres ne l’ont pas choquée. Ni celui de son entourage, de ses amis ou de ses voisins. Et quand bien même ce serait le cas, elle s’en moque éperdument.

Mais je suis quelqu’un qui ne souhaite pas tellement l’aide des autres. On a envie, parce qu’on a toujours vécu autonome, on ne se languit pas d’être dépendant des autres. Jusqu’au bout, je résiste et je n’ai envie d’avoir personne à mes côtés. L’aide ? Ils sont là si je demande. Si j’ai besoin d’un secours, ils sont absolument tous présents. Mais je suis tranquille du côté où je ne veux pas être maternée. Mes amis viennent me chercher quand on a envie d’aller quelque part. Ils me portent s’il est besoin de me porter parce qu’il y a des escaliers, quelque chose comme ça. Comme je ne suis pas lourde, ça se passe bien. Je pense que le handicap, ce n’est pas vraiment une gêne au niveau des personnes. Au début oui, parce qu’on ne l’accepte pas soi-même. Alors le regard des autres, on est un peu à l’affà »t, on a l’impression que tout le monde nous regarde. Maintenant, je n’en ai rien à cirer des autres ! Maintenant ce qui est très important, c’est ce que je vis parce que c’est prenant. C’est hyper prenant. Je n’ai pas le temps de regarder les voisins. Je m’en moque. Mais tout le monde est très gentil. Tout le monde rend service.

Par choix, elle a décidé de renoncer à sa vie de couple.

J’avais une vie affective. Je m’en suis libérée ça ne fait pas longtemps. Je n’avais pas une vie de couple, j’avais une vie avec un amant. Et puis après, j’ai dit : "Stop ! ça ne m’intéresse plus, maintenant." Pas parce que je suis handicapée, par choix tout simplement. Et puis la vie de couple ! Qu’est-ce que je vais faire ? Je vais dire : "Tu vas me chercher ça, tu me prends le linge !" Il va tout faire à ma place. Je ne veux pas. Je n’ai pas envie. Le peu que j’arrive à faire, je suis fière de le faire. Je disais à un copain, j’ai l’impression que je suis devenue misanthrope. Je n’ai plus besoin des autres. Je suis autonome, vraiment autonome à cent pour cent. Et puis ça ne me manque pas. Ça dépend des personnes. La sexualité, je l’ai eue, il n’y a pas très longtemps encore. Je n’ai pas l’impression que depuis que je ne l’ai plus, j’ai changé. Non, je n’ai pas cette impression. J’en ai été surprise, d’ailleurs. Moi aussi c’était le hasard, je ne savais pas. J’ai dit : "J’ai envie de rompre", j’ai rompu. Que je l’aie oublié aussi vite, ça m’a surprise. J’ai pensé sentir un manque, j’en étais persuadée mais absolument pas.

Pratiquant le yoga, elle en est venue à la méditation, la macrobiotique et l’alimentation crue et témoigne des bienfaits qu’elle en retire.

J’ai connu la méditation à l’âge de vingt-cinq ans par le yoga. La prof nous demandait toujours de faire un quart d’heure de méditation avant le cours. Certainement pour se laver de toute l’agitation extérieure. Je l’ai toujours fait parce que c’est comme ça. Je n’avais pas le choix. Des années et des années, j’ai fait ça, jusqu’à ce qu’un jour, je bifurque sur l’alimentation. J’ai envie de faire la macrobiotique. C’est une alimentation à base de céréales, c’est japonais. Je suis restée trois ans à cette alimentation. De là , je pars en stage à St Gaudens pour faire la macrobiotique. J’ai fait trois stages là -bas et le responsable me dit à la troisième fois : "Il faudrait que tu fasses plus de méditation." Alors je lui dis : "Moi j’en fais dans mon cours de yoga", il me dit : "Ce n’est pas suffisant, un quart d’heure, il faut que tu en fasses beaucoup plus". Alors je suis allée dans ce dojo en 98 et depuis, j’en fais très sérieusement. Maintenant je suis devenue trésorière de cette association, ça me fait une petite activité mentale et c’est très bien parce que j’en ai besoin. Depuis, je fais cette méditation mais c’est très loin maintenant parce que j’ai déménagé. Ça me fait traverser tout Marseille parce que c’est près des Réformés. Mais j’y vais avec le GIHP régulièrement, trois fois par semaine. Il y a deux ans, j’ai lu un article d’un gars qui avait la sclérose en plaque et qui avait guéri entre guillemets. Je me suis dit : "Tiens, je vais l’appeler." Il y avait son téléphone et j’ai parlé avec lui. Il avait guéri, enfin guéri entre guillemets, depuis au moins quinze ans, grâce à l’alimentation crue. Mais intégralement crue. Alors j’ai dit : "Vous allez bien ? Dans quel état êtes-vous ?" Il me dit : "Moi je vais bien, j’élève mes deux enfants et je construis ma maison." Alors je lui ai dit : "Alors je viens au stage." Il était à Toulon, j’y suis allée il y a deux ans et là , tout de suite, je me suis sentie bien. J’étais toujours très fatiguée après manger, style gros besoin de dormir, grosse fatigue, pourtant je ne mangeais pas des tonnes et là , en faisant ce régime cru, je n’avais plus cet inconfort de grosse fatigue. Alors je me suis dit : "C’est merveilleux" et depuis, je fais cette alimentation. Je ne peux pas dire que c’est la panacée, ce n’est pas vrai, mais en tout cas, alors que j’avais toujours une infection urinaire permanente depuis des années, elle a disparu. Je suis vachement plus en forme. Forcément, j’ai plus d’infection ! Je ne peux pas dire que je gambade grâce à ça, ce n’est pas vrai, mais l’état général s’est quand même bien amélioré. Tous les aliments sont crus. Absolument plus de cuisson. Viandes, poissons, mais de très bonne qualité. Ce n’est pas n’importe quoi. Des produits "bio" et surtout, l’alimentation crue, c’est le respect de notre corps mais le respect du corps des animaux qu’on va manger. Ces animaux n’auront pas mangé n’importe quoi. On ne leur aura pas fait des piqà »res pour qu’ils grossissent. Pas de pénicilline, de vaccins. Les animaux sont tels que la nature les a créés à l’origine. Et nous, on mange comme la nature veut qu’on mange à l’origine. On ne peut pas manger trafiqué ! Le progrès a fait que l’alimentation est maintenant énormément variée, imaginée, alors qu’à l’origine, c’est le fruit sur l’arbre, le légume quand il pousse, point final. Pas le légume préparé. Mais en tout cas, c’est simple, très facile. Rien à faire.

Propos recueillis le 03/11/04 par Amina Hamadi et Salima Tallas


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