La zoothérapie, un mieux-être grâce à la médiation animale
Les animaux ont un fort pouvoir thérapeutique auprès des personnes souffrant d’anxiété, de dépression, de troubles du comportement.
Nathalie Chardeyron, zoothérapeute a réuni toute une petite équipe de chiens, lapins et cochons d’Inde, qu’elle amène dans diverses structures accueillant des personnes handicapées, malades ou fragilisées à qui ses animaux apportent bien-être et réconfort !
Handimarseille : Pourriez-vous vous présenter ?
Nathalie Chardeyron : Je m’appelle Nathalie Chardeyron, j’habite dans les Alpes-Maritimes. Je suis intervenante professionnelle en zoothérapie, j’ai créé ma petite entreprise qui s’appelle ViA’nimaux et j’interviens avec mes animaux dans différents établissements, des maisons de retraite, des instituts pour enfants handicapés, afin d’apporter un mieux-être à ces personnes.
H : Pouvez-vous expliquer ce qu’est la zoothérapie ?
N.C : La zoothérapie cherche à favoriser les liens naturels qui existent entre les humains et les animaux à des fins préventives, thérapeutiques et éducatives.
La zoothérapie est aussi appelée « médiation animale », on utilise le terme zoothérapie, surtout dans des pays tels que le Canada ou les États-unis, en France nous préférons « médiation animale ».
H : Quelles sont les qualifications et les compétences nécessaires pour être zoothérapeute ?
N.C : En ce qui concerne mes animaux, chacun d’eux est spécifiquement choisi, éduqué et socialisé pour mon travail. J’ai 7 cochons d’Inde qui sont différents les uns des autres au niveau du comportement, de la race ou de la couleur car ils doivent pouvoir correspondre à un grand nombre de personnes.
C’est aussi surtout de la confiance car on ne peut pas dresser un petit rongeur. Ils sont socialisés dès le plus jeune âge avec moi, chez moi. Il faut qu’ils soient très gentils car je ne peux pas me permettre d’arriver avec un animal qui mord, qui est peureux ou malade.
En dehors des soins, il faut aussi savoir rentrer en communication avec eux pour anticiper les réactions, les comprendre et s’adapter car ça reste des animaux qui sont présentés à des personnes fragilisées et dépendantes. Il faut toujours avoir un œil sur eux pour sécuriser la relation homme /animal.
Je travaille aussi avec ma chienne de race grand bouvier suisse qui s’appelle Happy. Elle a suivi un dressage pour la zoothérapie et a reçu une formation spécifique avec un dresseur et un éducateur canin. Elle répond aux ordres gestuels et verbaux et a été habituée à ce qu’on la touche, lui tire les poils ou autres.
Concernant l’intervenant, il faut avoir de très bonnes et solides connaissances du monde animal. L’intervenant en zoothérapie doit aussi avoir une formation dans la filière sciences médico-sociales ou sciences humaines et y avoir travaillé. Ensuite il faut passer le diplôme de zoothérapie. Vous avez plusieurs structures en France, mais moi j’ai obtenu ce que l’on appelle le certificat de compétence intervenant en médiation animale que j’ai passé avec l’Institut de zoothérapie AGATÉA. J’ai aussi obtenu un certificat de capacité relative à l’exercice des activités liées aux animaux de compagnie qui est délivré par les services vétérinaires et qui donne un agrément pour avoir le droit de présenter des animaux dans des lieux publics.
Il faut également être passionné car cela demande un énorme investissement. Il y a des soins quotidiens, une présence permanente, je ne peux pas me permettre de partir en week-end ou en vacances et ça a un coup très important car il faut pouvoir s’en occuper et les faire suivre régulièrement par un vétérinaire. Donc pour ceux qui voudraient se lancer dans l’aventure, il faut savoir que c’est une contrainte de tous les jours, du lundi au dimanche.
H : Vous travaillez avec quel public ? Quelles structures ?
N.C : La zoothérapie s’adresse à toute personne fragilisée par la vie, la maladie ou le handicap, que ce soit des enfants ou des adultes.
Si on prend les enfants par exemple, les séances que je propose sont très bénéfiques car je me sers de moyens ludiques et très interactifs. Il est très important d’apporter un aspect ludique avec les enfants qu’ils soient handicapés ou polyhandicapés mais ça peut être aussi des enfants timides, réservés ou aux contraires hyperactifs car l’animal permet de canaliser les émotions et apaise.
Je fais aussi de la zoopédagogie avec les enfants en échec scolaire grâce à ma formation initiale (en licence des sciences de l’éducation).
Le contact animal dans un premier temps permet à l’enfant de reprendre confiance en lui et de s’apaiser. Si l’enfant a du mal à faire ses devoirs, je vais par exemple lui demander de lire une histoire au lapin. Le lapin me sert de médiateur, ça ne sera pas fait pour moi donc l’enfant va très souvent vouloir le faire pour l’animal.
Pour les personnes âgées, beaucoup sont atteints de la maladie d’Alzheimer ou apparentées car je travaille en maisons de retraite et services thérapeutiques de jour. C’est très bénéfique car ça permet vraiment d’apporter une communication, un apaisement, de l’estime de soi et une diminution du trouble alimentaire parce qu’ils sont auteurs des soins envers les animaux alors qu’habituellement ils ne sont pas autonomes. C’est vraiment un rapport qui change.
Pour les handicapés, je travaille généralement avec des enfants et on est surtout dans la stimulation sensorielle, je travaille les 5 sens et j’essaie de stimuler grâce à l’animal chacun des sens des enfants en m’adaptant au handicap.
H : Pouvez-vous nous expliquer comment vous travaillez ? Nous décrire une séance ?
N.C : Oui, alors par exemple avec un enfant handicapé, la séance se fait avec 8 à 10 enfants autour d’une table. Ils sont souvent accompagnés du personnel de l’établissement surtout s’ils sont polyhandicapés. Ça se joue d’abord par le visuel, les enfants s’assoient, je commence par beaucoup leur parler en expliquant toujours ce que je fais ensuite je présente mes animaux, je montre l’animal à l’enfant, je le lui mets sous les yeux, je prends sa main, je lui fais toucher pour qu’il prenne contact. Ça dure un petit moment par ce que j’ai 13 animaux, des cochons d’Inde, des lapins, et des chinchillas. Une fois que l’aspect visuel est entré en compte, on rentre dans le reste des activités et je demande aux enfants de nourrir les animaux. Selon les capacités de l’enfant, je pose la nourriture devant l’enfant avec l’aide du personnel, ils prennent une salade, une carotte et là c’est beaucoup de sourires par ce qu’ils arrivent à réaliser quelque chose.
Ensuite je passe à l’aspect sensoriel avec par exemple un gros lapin bélier qui est très sympa pour ça, je le pose sur les genoux de l’enfant qui ressent la chaleur de l’animal, c’est vraiment le contact et là il le caresse, il y a à chaque fois, là aussi, beaucoup de sourires, beaucoup d’émotions et de choses positives qui se dégagent.
H : Quels sont les bénéfices thérapeutiques sur le handicap ou la maladie ? Au bout de combien de séances pouvez-vous observer un changement chez le patient ?
N.C : Ils sont chez certains enfants, progressifs. Je ne dis pas qu’à la première séance on arrive à avoir un apaisement immédiat mais au bout de plusieurs séances, oui, il y a une véritable stimulation, un apaisement et un mieux-être.
Une chose très importante à préciser concernant la zoothérapie, il faut bien savoir qu’elle ne soigne pas ! Ce n’est pas un médicament ! C’est quelque chose qui vient en complémentarité avec ce que propose justement le corps médical. Quelque-chose qui apporte un mieux-être, du plaisir, donc un bénéfice sur le long terme pour le côté affectif, le bonheur et l’aspect psychologique qui est vraiment très important.
C’est magnifique de voir chez certains enfants qui n’ouvrent plus les mains, faire des efforts extraordinaires pour avoir le plaisir de toucher l’animal. Ils ont un but magnifique qui les pousse à se dépasser.
L’animal apaise, il est vraiment un substitut affectif pour les enfants qui sont parfois seuls, confrontés à la maladie, et c’est un petit moment de bonheur, de soleil, c’est de la vie, de l’amour. Et lorsque l’animal est souvent avec les enfants, ils oublient la maladie, d’ailleurs chez certaines personnes on observe une baisse de la tension artérielle et une baisse du rythme cardiaque.
Je propose des grilles d’évaluation qui me permettent de voir la progression du comportement des personnes, c’est aussi ça qui donne une visée thérapeutique à mes séances. Durant la première séance, je fais un constat du comportement de la personne concernant l’aspect cognitif, psychomoteur, psychologique, sensoriel, sur la communication, le relationnel et l’affectif qui me permettent de voir la progression et l’évolution de chaque personne.
H : Travailler avec des animaux dans des structures médicalisées impose des règles d’hygiène et de sécurité, comment vous adaptez-vous ?
N.C : Je passe une convention avec les différents établissements sur laquelle j’explique tout ce que je fais. Pour ce qui est de l’hygiène, je remets un certificat prouvant que les animaux sont en bonne santé, que le chien est vacciné, tatoué.
Lorsque ce sont des établissements vraiment très à cheval sur l’hygiène, en général je fais mes séances dans des pièces un peu à l’écart ou bien je n’y vais pas quand il s’agit des services de pédiatrie dans les hôpitaux, même s’il est vrai que j’aimerais beaucoup travailler avec les enfants malades dans ces services car je suis persuadée du grand bénéfice que ça peut leur apporter.
H : Qui et comment fait-on appel à vous ? Comment sont financées vos interventions ?
N.C : Cela fait à peu après un an que je fais ce métier, je suis passée par beaucoup de démarchages de ma part pour me faire connaître auprès des instituts, c’est aussi grâce à mon réseau et via internet. J’ai créé mon propre site qui s’appelle ViA’nimaux, grâce auquel on peut me contacter, et par le biais du bouche-à-oreille aussi, c’est très variable.
Je suis financé en fonction du budget des instituts, très souvent ça fait partie du budget animation pour les IME et autres.
H : J’ai su par votre site internet que vous aviez inventé des jeux avec vos animaux. Pourriez-vous nous en parler ?
N.C : Oui, ça me permet de terminer doucement mes séances pour éviter de couper l’activité brusquement.
J’ai différents jeux, j’ai pris en photo ma petite équipe de lapins et de cochons d’Inde pour faire des jeux de mémoris. J’ai aussi fabriqué un puzzle avec une photo de mon lapin que j’ai découpée en plusieurs parties. Je propose les activités en fonction de comment je souhaite terminer mes séances.
H : Avez-vous quelque chose à ajouter ?
N.C : Je dirais simplement que je vis à 100% mon métier qui est une passion, voir le sourire et la joie d’un enfant ou d’une personne qui ne souriait ou ne parlait plus, c’est extraordinaire. Je me nourris de ça et c’est fantastique.
H : Merci pour cet échange.
N.C : Ça fait très plaisir, merci à vous.
Propos recueillis par Géraldine Deshais
Voir en ligne : ViA’nimaux
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