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Le théâtre, vecteur de cohésion sociale

Pour Alfonso Rodriguez, qui anime des ateliers pour la compagnie Tétines et Biberons, le théâtre est avant tout une aventure humaine. Non seulement le spectacle vivant permet de combler le fossé qui nous sépare les uns les autres, mais c’est également une source de développement personnel et professionnel inestimable pour ce comédien uruguayen. C’est en toute humilité qu’il nous fait partager son parcours et ses réflexions.

Le théâtre, vecteur de cohésion sociale

Handimarseille : Pourriez-vous vous présenter ?

Alfonso Rodriguez : Je m’appelle Alfonso Rodriguez et je suis né en Uruguay. Je suis comédien et j’habite à Marseille depuis 1998. Je travaille dans le théâtre. Depuis 3 ans, j’interviens notamment pour Tétines et Biberons dans le cadre de ses activités de transmission du théâtre auprès du public handicapé, des séniors, des personnes en difficulté après un accident, des traumatisés crâniens. Cela se fait par le biais d’ateliers que je donne chaque semaine tout au long de l’année, mais aussi par la mise en scène de spectacles amateurs avec eux.

H : Quel a été votre parcours artistique ?

A.R : J’ai commencé en Uruguay. J’ai fait ma première école de théâtre là-bas, ainsi que mes premiers pas sur les planches. Deux ou trois ans après, j’ai pris l’avion pour l’Europe et j’ai pu poursuivre mes études à Barcelone et à Madrid. Puis en 96, j’ai accepté une proposition pour un stage international qui a débuté à Marseille, avec une sélection de comédiens de la Méditerranée. C’était un projet local qui rassemblait des acteurs et d’autres artistes. Il y avait une équipe de mise en scène, une équipe de créateurs d’objets scéniques et des décors pour créer un spectacle dont le thème était la Méditerranée. Ce projet a commencé à Marseille et, par la suite, j’ai enchaîné d’autres idées, d’autres projets dans cette ville et je suis resté y vivre. Ça fait déjà plus de 15 ans que je fais du théâtre dans la région.

H : Qu’est-ce qui vous a amené à travailler avec la compagnie Tétines et Biberons ?

A.R : Je suis allé voir une des créations d’atelier, ça m’a intéressé et on m’a proposé d’intervenir. Ce qui m’a fait accrocher à ce projet, c’est le besoin de travailler, mais surtout ce que j’ai découvert en moi : d’abord, l’envie de transmettre et ensuite, les compétences nécessaires pour travailler avec des populations multiples. Mais ce qui m’a intéressé dans le fond, c’est la combinaison d’objectifs artistiques où le rapport humain doit être très présent. Ce qui fait que le travail est difficile, mais très agréable. Même si tout n’est pas agréable dans la difficulté, parce qu’elle nous met face à des peurs et à des angoisses. Mais c’est une chose que je fais toujours avec beaucoup d’engagement. Par exemple, est-ce que je suis dans le bon équilibre entre mes exigences et les besoins de la personne de se faire plaisir à travers une activité créatrice ? Le bon équilibre entre la rigueur du travail soumis à des contraintes et les objectifs individuels de pouvoir s’exprimer, recréer des liens avec d’autres personnes et acquérir de la confiance en soi.

H : Pensez-vous que les participants peuvent en retirer un bénéfice thérapeutique ?

A.R : Oui, tout ce qui nous fait du bien peut avoir un effet thérapeutique. Se faire du bien, c’est se soigner d’une douleur, d’une blessure et du sentiment de ne pas pouvoir s’exprimer.

H : Travaillez-vous avec tous les handicaps ?

A.R : J’ai travaillé avec des personnes qui ont des handicaps physiques et cognitifs.

H : Pourriez-vous me décrire la façon dont vous procédez ? Comment vous adaptez-vous aux différents publics ?

A.R : Effectivement, je travaille beaucoup par adaptation. C’est un travail sur mon écoute qui me permet de rester en contact avec la population avec laquelle je travaille. Je procède à partir de quelques techniques que j’ai acquises dans mon métier : des techniques de jeu, de travail corporel, de respiration, d’écoute... Par la transmission d’une expérience, par l’écoute des personnes que j’ai en face de moi au jour le jour, parce que la situation peut changer d’un jour à l’autre. Donc il y a mon adaptation à la réalité en permanence et la gestion des multiples aléas qu’il peut y avoir : absences, accidents en cours d’année, un handicap qui s’aggrave ou le moral de la personne qui change. Je suis à l’écoute de tout ça pour maintenir une dynamique de groupe dans laquelle l’individu peut s’exprimer et se sentir lui-même en équilibre.

H : Quels sont vos objectifs dans un atelier en ce qui concerne la personne handicapée ?

A.R : Que la personne puisse faire une année d’atelier et qu’elle fasse partie du spectacle de fin d’année, s’il y en a un. C’est vrai qu’il peut arriver que la personne se sente mieux intégrée en groupe, en ayant vécu et partagé des choses intéressantes avec le groupe et avec moi-même. Si c’est dans le cadre d’un spectacle, le fait de s’être engagé à l’année lui a apporté une expérience, dans laquelle il y a un contact avec le public, qui peut être composé de personnes proches dans la plupart des cas, mais des fois ce sont des personnes inconnues qui viennent de l’extérieur. Et ça fait un pont avec la société, ça fait un lien. C’est là que le mot « lien social » prend son sens. Parce que ce jour-là, il y a un regard extérieur, un applaudissement, des moments partagés, des mots : « c’était bien ce que j’ai vu, merci. »

H : Animez-vous également des ateliers mixtes, mêlant personnes valides et personnes en situation de handicap ?

A.R : Oui, tout à fait. C’est le cas dans un de mes ateliers en ce moment.

H : Quelles dispositions cela exige-t-il ?

A.R : Cela exige surtout une observation, une écoute des possibilités physiques, des possibilités émotionnelles et psychologiques des participants. Et donc des réponses en fonction de ces possibilités-là.

H : Quel type de réaction avez-vous pu constater au terme d’un spectacle de la part des personnes handicapées ?

A.R : Ils expriment les choses de façon très sincère. Ils m’en parlent et me disent : « au début, tu étais comme ça, maintenant ça se passe comme ça, on sent que tu as pris en charge notre handicap ». Il y en a qui en parle, il y en a qui n’en parle pas parce qu’ils ne peuvent pas s’exprimer facilement, mais ils me le font sentir d’une autre façon. Par exemple, quand on a des fous rires. Ce sont des moments très émouvants. Je fais une blague parce que je me sens libre de m’exprimer moi aussi. Eux, ils ressentent ça immédiatement. Et il y a un moment où on partage un grand rire à l’unisson dans la salle. Et je n’aurais jamais imaginé qu’on pourrait avoir, par moments, ce degré d’empathie.

H : Et de la part du public ?

A.R : En général, c’est un public silencieux, qui observe. Parfois c’est un public de professionnels, de personnes handicapées, de personnes qui s’occupent de personnes handicapées, des membres de la famille de personnes handicapées. Mais des fois, c’est un public ordinaire, qui n’est pas en contact avec le handicap au quotidien. Et ça, c’est le plus intéressant parce qu’ils sont parfois devant des moments inouïs, des moments inattendus, des moments partagés, des moments de théâtre qui ne sont pas imaginés au préalable.

H : Qu’est-ce qui vous plaît dans le travail avec des personnes en situation de handicap ?

A.R : Moi ce qui me plaît, c’est plutôt ce qui me touche. Il y a un temps pour s’écouter, pour être patient par rapport à l’autre. Et ce temps-là, c’est acquis pour eux, mais ce n’était pas forcément acquis pour moi au début. Donc je pense que j’améliore progressivement mes compétences professionnelles, c’est-à-dire la patience et la bienveillance. Ce qui n’est pas toujours à l’ordre du jour dans n’importe quel autre métier. Même si on est très professionnel, on n’est pas toujours doué à ce niveau-là.

H : Qu’en retirez-vous personnellement ?

A.R : Je me suis toujours senti très reconnaissant. C’est un travail difficile, mais la contrepartie est très généreuse, surtout dans le cas des personnes handicapées. En général, ce sont des personnes qui ont un très bon tempérament. Je n’aime pas faire des généralisations, mais là je peux les faire. J’ai une reconnaissance affective et humaine immédiate.

H : Quelles sont les questions que peut poser le handicap dans notre société ?

A.R : Une question que pose le handicap quand on le côtoie au jour le jour, c’est la prise de conscience, à un moment donné, qu’on n’est pas à l’abri. Même si on est valide, on n’est pas à l’abri d’un traumatisme, d’un accident, d’un handicap. Comme on n’est pas à l’abri de la mort. N’importe qui peut basculer du jour au lendemain, du statut de personne valide au statut de personne handicapée. Et à ce moment-là, on se retrouve dans une partie de la société qui n’est pas visible, avec laquelle il n’y a quasiment aucune communication. Et en travaillant dans ce secteur en tant que personne de théâtre, ça pose la question du langage : quel est le langage théâtral dans un travail ou la communication avec l’autre n’est pas donnée d’avance ? Et là, il y a un champ qui s’ouvre. Si on est dans l’expression corporelle, dans l’expression émotionnelle ou le langage parlé. Quelle parole ? Quel texte ? Quelle quantité de textes ? Comment on communique ? Comment fait-on pour partager ces moments de théâtre ? Ça m’apporte des questionnements, des éléments de réponse, l’approfondissement de sujets de recherche.

H : Quel message aimeriez-vous faire passer aux lecteurs d’Handimarseille ?

A.R : De s’intéresser aux manifestations théâtrales qui sont portées par un public handicapé. Et moi, je ne cache pas le mot ! Je ne cache pas le handicap, tout comme je ne me cache pas les handicaps que je peux avoir !

H : Merci beaucoup d’avoir répondu à nos questions.

A.R : De rien.

Voir en ligne : Compagnie Tétines et Biberons


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