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Ces maux qui échappent à nos yeux

Nous savons tous, d’une façon ou d’une autre, ce qu’est un handicap. Et tous, nous avons déjà croisé au moins une fois le chemin de quelqu’un qui en est affublé.
Que notre santé, notre constitution soient parfaites ou défaillantes, nous pouvons tous imaginer ce que c’est de porter sur soi le signe visible d’un défaut plus ou moins important de notre organisme : il peut marquer notre peau, nos traits, notre silhouette, notre démarche, en bref notre apparence, ou bien nous accompagner avec plus ou moins de discrétion : fauteuil roulant, canne blanche... Certains l’avouent, d’autres non : nous ne sommes pas tous aussi ouverts d’esprit qu’il le faudrait pour vivre en harmonie avec notre prochain, et nous ne sommes pas toujours prêts à accepter ses différences, quelles qu’elles soient.
On pense souvent que les « valides » sont les plus intolérants face au thème du handicap, mais si l’on tend bien l’oreille, on se rend compte que souffrir soi-même d’une forme de handicap ne rend pas forcément plus indulgent quant au vécu des autres. D’ailleurs, c’est une chose de ne pas être dérangé par le handicap des autres ; accepter d’en avoir un nous-même, et d’être défini par une certaine étiquette, associé aux stéréotypes, aux clichés qui vont avec : c’en est une autre...!

Ainsi il y a bien un moment ou un autre où, quelle que soit notre constitution, nous nous faisons comme réflexion que « ça ne doit pas être facile, de vivre avec ça », de supporter le regard des autres en permanence... Le regard des gens, les remarques des enfants dans la rue.
Pourtant, il y a fort à parier que toutes les personnes dont le handicap est prétendument « invisible » n’ont pas le sentiment d’avoir la vie plus facile...

Nombreux sont les handicaps que l’on peut qualifier d’ "œinvisibles" . Il est probable que la plupart d’entre eux soient des maladies, physiques ou psychiques. On pensera aussi, bien sà »r, à un handicap connu de tous, la surdité. Il peut également s’agir des lésions cérébrales acquises suite à un traumatisme crânien... [1] Mais qu’est-ce qu’un handicap « invisible » ? Invisible aux yeux de qui...? Car il ne fait aucun doute que le principal concerné et, sans doute, son entourage le plus proche, ressentent suffisamment sa présence au quotidien pour ne jamais l’oublier...

"œVisible" , c’est d’abord aux yeux de la société. Un handicap invisible, c’est un handicap que l’autre ne verra pas au premier regard. C’est ce que l’employeur ne pourra pas détecter sans nous poser de question. C’est la « tare » que l’on pourra cacher un temps à ceux qui nous sont les moins proches. Mais dont on redoutera malgré tout la découverte, car la discrétion ne suffit généralement pas à entériner nos maux et nos stigmates, ni leurs conséquences...

Et puis, lorsque le handicap est visible, il permet d’ "œannoncer la couleur" . Avoir l’air normal, c’est commencer par s’intégrer dans un milieu qui n’est "œpas tout à fait le nôtre" , et risquer d’être d’autant plus violemment rejeté par la suite. Sans dramatiser, c’est surtout craindre encore plus la réaction de l’autre, à qui on laisse croire un temps, par pudeur ou par gêne, que nous sommes tous deux similaires... Autant que faire se peut.

Pour se faire l’avocat du diable, disons aussi que lorsque cela se voit, d’une certaine manière, on n’a pas la pleine responsabilité de l’annonce du handicap... Car quand l’annonce reste à faire, il ne s’agit pas seulement de recevoir la réaction de l’autre, mais de trouver le bon ton, les bons mots pour la décrire et l’expliquer, énoncer les conséquences qu’elle a et aura nécessairement sur nos interactions... Il faut savoir dire les choses sans faire peur à l’autre. Il faut savoir dire ce qu’elles impliquent... Mesurer sa pudeur. On n’a pas toujours envie d’énoncer les détails, de dire ce qu’est la maladie, ce qu’elle représente pour nous, en quoi elle nous a changé et a changé notre quotidien. Parfois les symptômes liés sont tabous, gênants, honteux. Parfois on n’a juste pas envie d’avoir en retour un regard empli de pitié, parfois confondue avec de la simple, bienveillante compassion...

On ne veut pas que le regard de l’autre change, ni notre statut ; encore moins nos relations. On sait qu’il ne peut pas vraiment comprendre ce que l’on vit à moins de passer par les mêmes épreuves... On a envie qu’il comprenne, qu’il sache comment s’adapter à nous, aux moments où on ne pourra faire taire notre petite santé et ses exigences, qu’il soit en mesure d’avoir la réaction appropriée, de nous témoigner, éventuellement, la sollicitude dont on aurait besoin... Mais en même temps on voudrait mettre tout ça de côté, parce que si l’étiquette est permanente, la maladie ne l’est pas toujours, ou plus exactement ses symptômes : et tant qu’on va bien, on voudrait ne pas être traité différemment.
Et même lorsque ça ne va pas, on ne peut pas porter l’inquiétude de nos proches en plus de notre propre fardeau... Quoi de plus dur, lorsque l’on s’applique déjà à serrer les dents et à combattre ce qui nous ronge, que de devoir, de surcroît, rassurer notre entourage et prétendre que ce n’est pas si grave pour ne pas les entraîner dans notre chute ?

Autre facette du handicap « invisible » au quotidien : il n’est pas facilement reconnu. Sans parler du diagnostic, qui prend parfois beaucoup de temps avant d’être posé, et complique d’autant plus le vécu de la personne concernée (qui pourra finir par croire qu’elle exagère effectivement, que les symptômes sont "œpsychosomatiques" et même culpabiliser de se sentir malade ou fatigué "œsans aucune raison" ) il faut souvent se justifier devant les administrations, les employeurs, les professeurs... Comment la MDPH peut-elle évaluer le degré d’incapacité d’un malade dont les symptômes varient au jour le jour, ou la gravité d’une maladie qui varie d’un individu à l’autre, peut être dramatique chez l’un et totalement bénigne chez l’autre ? Quel employeur prend le risque d’embaucher quelqu’un atteint d’une pathologie qui peut être grave, mais ne l’est pas forcément ? Qu’on ne nous fasse pas croire qu’ils sont nombreux à interroger le candidat pour savoir s’il est apte ou non, quelles sont ses capacités réelles... Le statut même de travailleur handicapé, bien qu’il donne droit à des aides de l’Etat, continue d’en effrayer plus d’un !

Cela suscite aussi certaines aberrations : ainsi un étudiant handicapé, bénéficiant du « tiers-temps », doit justifier chaque année, certificat médical à l’appui, de n’avoir pas guéri d’une maladie pourtant incurable...! Gageons que les personnes dont le handicap est plus flagrant connaissent elles aussi ce genre de mésaventures... Cette constante obligation de se justifier ajoute à la croix que l’on doit déjà porter !

Reconnaissance toujours, lorsqu’il s’agit de faire comprendre à ses proches et moins proches que la fatigue ou l’irritabilité font partie intégrante de notre syndrome, qu’elles vont bien au-delà des efforts que l’on pourrait faire pour "œprendre sur soi" et "œse bouger"  ? Entre ceux qui dramatisent et ceux qui minimisent... Comment équilibrer sa vie sociale, comment trouver ses repères, sa place ? Nous ne savons pas toujours nous-mêmes de quoi nous avons besoin. Le besoin d’autonomie, d’indépendance contredit le besoin d’être réconforté, aidé. Lorsque les symptômes, les maux sont flagrants, il est plus facile d’obtenir l’indulgence des autres. Lorsque c’est trop discret, ils ont du mal à croire que l’on souffre, ou à se représenter à quel point.

Alors oui. Ne pas être jugé, étiqueté invalide ou malade, "œesquinté" , au premier regard, c’est un atout. Mais ce privilège est souvent limité dans le temps et comporte ses propres inconvénients. Reste que nous avons tous besoin d’exister pour nous-mêmes, et que le handicap n’est rien d’autre qu’une particularité qui vient se greffer à une personnalité, un parcours et un vécu uniques, qui ne sauraient se résumer ni à travers lui, ni à travers les contraintes qu’il impose. Espérons que ceux qui nous entourent, collègues, voisins, amis, famille, et en premier lieu nos lecteurs, tiennent compte de ce fait et perçoivent leur prochain, voire l’apprécient, pour ce qu’il est, et non pour ce handicap qui est le sien, visible ou pas !

L.L.

Notes

[1Voir notamment la brochure d’aide aux personnes qui en souffrent, de La Braise, centre de jour en Belgique : http://www.labraise.org/handicap-invisible.pdf


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