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Entretien avec Martine Vernhes, malvoyante.

Je suis Valenciennoise, une ch"™ti ! Mère de deux enfants de 19 et 25 ans et grand-mère d"™une petite fille de 3 ans. Mon époux est non-voyant ; quant à moi, la malvoyance est congénitale.

HandiMarseille - Madame Vernhes, pouvez-vous nous expliquer l"™origine de votre handicap ?
Martine Vernhes - Je suis née prématurément dans les années 50. Ma mère a contracté la toxoplasmose et la rubéole pendant sa grossesse. À ma naissance, les médecins se sont occupés du plus urgent, « me sauver la vie ». Mes parents leur avaient signalé que j"™avais un œil atrophié par rapport à l"™autre, mais ce n"™était pas la priorité.

H. - Comment percevez-vous ? Voyez-vous les couleurs par exemple ?
M.V. - Je distingue les formes, grossièrement, et les couleurs vives. Évidemment, c"™est plus difficile de différencier un bleu foncé d"™un noir.

H - Une opération est-elle envisageable de nos jours ?
M.V. - Non, on ne peut rien faire. La rétine est prise à 95%, seule la macula me permet de percevoir. Aucune opération n"™est possible.

H - Avez-vous pu suivre votre scolarité en milieu ordinaire ?
M.V. - Oui, j"™étais en école privée à Valenciennes chez les religieuses. Elles ont fait de leur mieux pour me permettre d"™avoir une certaine autonomie. L"™enseignante des C.P. avait déjà une certaine expérience : elle avait appris à un trisomique à lire et à écrire. Pour moi, l"™apprentissage s"™est réalisé avec les yeux collés sur le cahier. Des petits trucs, comme par exemple attacher le crayon à l"™ardoise me facilitaient la vie. Plus tard, au collège, les enseignants jouaient le jeu, ils écrivaient au tableau et lisaient en même temps. Si je devais rattraper un cours, je prenais le cahier de la voisine. Pour apprendre le braille, à cette époque, il fallait aller sur Lille. Ma famille ne le souhaitait pas et le spécialiste leur avait conseillé de m"™éduquer normalement. Par la suite, j"™ai rencontré des amis non-voyants à Valenciennes, c"™est à ce moment-là que j"™ai eu une première approche du braille.

H. - Où vous situez-vous dans le monde des non-voyants et malvoyants ?
M.V. - En France, il y a 1% de la population ayant une problématique de handicap visuel. Parmi celle-ci, certaines sont considérées comme aveugles complètes, les autres sont malvoyantes et certains ont une incapacité très sévère. Ils ne peuvent ni lire ni écrire en noir et n’ont qu’une perception lumineuse.

H. - Apprend-on le braille comme une seconde langue ?
M.V. - Oui. Quand on naît non-voyant, on apprend le braille dés la petite enfance. Si la personne perd la vue suite à un accident ou une maladie, si elle le souhaite, elle l"™apprendra, comme un enfant de cours préparatoire.

H. - Est-ce obligatoire ?
M.V. - Non. Les perdants la vue sont informés sur le braille mais ne l"™apprennent que s’ils le souhaitent. Le déficient visuel peut très bien travailler avec du matériel adapté tel qu’un agrandisseur de caractère, une loupe ou synthèse vocale pour l"™informatique.

H. - L"™apprend-on pour rejoindre le monde des voyants ou pour connaître le monde ?
M.V. - Les deux. Le braille est important pour vivre dans le monde, mais il faut aussi connaître le monde plus largement et avoir les outils adaptés.

H - Avez-vous pu travailler en milieu ordinaire ?
M.V. - Suite à mon cursus, l"™ANPE m"™a dirigée en préparatoire "œKiné" , mais avec un BEPC dans les années 70, on n"™avait pas de cours de Physique-Chimie. J"™ai tout de même voulu tester, sans résultat. En conséquence, une formation d"™agent de standard m"™a permis de rentrer dans le monde du travail, en milieu ordinaire. Dans un premier temps, j’ai effectué des remplacements : dans un grand groupe à Paris pendant quelques mois, dans le secteur du social, avant de trouver une place dans une administration, pendant 2 ans et demi. Quelle que soit l"™entreprise, j"™ai toujours été très bien intégrée.

H. - Pour vous, qu"™est-ce que l"™intégration et qu"™est-ce que le handicap, vous a t-on aidée par exemple ?
M.V. - Le personnel ne m"™aidait que lorsque je le demandais. Moi-même j"™ai formé plusieurs valides au standard de l"™entreprise. Mes collègues connaissaient ma problématique et celle d"™autres handicaps, puisque d"™autres personnes en situation de handicap travaillaient dans cette entreprise.

H. - D"™après vous, les possibilités d"™emploi sont-elles restreintes pour les personnes ayant une déficience visuelle ?
M.V. "Oui et non, à l"™heure actuelle, c"™est difficile pour tous, valides et non. Leurs possibilités d"™emploi sont restreintes malgré les aides techniques existantes et l"™obligation d"™emploi de 6%.

H. - Que pouvez-vous nous dire à propos de la perception sensorielle ?
M.V. - Nous avons certains sens plus développés, le toucher, l"™odorat et une meilleure ouà¯e. C"™est ce qui m"™a permis en tant que maman, par exemple, de surveiller les enfants, de les entendre d"™une pièce à l"™autre. Évidemment, il y a des avantages mais aussi des inconvénients, il faut savoir faire la part des choses.

H. - Quelle différence y a t-il pour vous entre une cécité de naissance et une cécité plus tardive ?
M.V. - C"™est ressenti très différemment, selon chaque personne, son âge et sa situation familiale. Pour une personne qui est devenue malvoyante suite à un accident physique ou génétique, c"™est difficile : elle doit d"™abord l"™accepter et ensuite s"™adapter à un environnement visuellement familier qu"™elle devra redécouvrir avec ses autres sens. Tout dépend aussi de la personne, de son entourage familial et surtout de sa volonté.

H. - Quelles différences y a t-il entre se déplacer avec une canne et se déplacer avec un chien ?
M.V. - Pour les déplacements, certains se servent d"™une canne mais ne souhaitent pas avoir le chien pour des raisons personnelles : l’entretien de l"™animal, les poils dans l"™habitation, les allergies, etc. Le chien « guide » est néanmoins d"™un confort indéniable, pour sécuriser la personne dans ses déplacements ou éviter les obstacles dans la rue par exemple.

H. - Êtes-vous autonome dans vos activités quotidiennes ?
M.V. - Mon mari est non-voyant, pour autant nous réalisons tout ce qui est possible dans la vie quotidienne : les courses, la cuisine, le nettoyage et le rangement. Cuisiner, j"™ai appris avec ma mère, en faisant attention, avec précaution. Pour le gros du ménage, on fait appel à une femme de ménage.

H. - Percevez-vous une évolution entre hier et aujourd"™hui ?
M.V. - Grâce au développement de l"™informatique, on est mieux informés. Et même si on utilise encore le braille, un enfant d’aujourd’hui a accès à des aides que nous n"™avions pas. A l"™école, ils sont aidés par une Auxiliaire de Vie Scolaire, dés la maternelle. En crèche, des spécialistes informent la puéricultrice sur les nouvelles techniques d"™ergonomie...

H. - Par rapport aux retours que vous avez des pratiques actuelles, cet apprentissage est-il encore faisable ?
M.V. - Oui, c"™est faisable, mais il faut beaucoup de patience. Maintenant, avec toutes les aides, les loupes, les agrandisseurs, les malvoyants peuvent apprendre à écrire... Tout dépend de la volonté de la personne.

H. - Comment faites vous pour bien percevoir le monde et sa réalité, pour être au courant des informations ?
M.V. - On s"™instruit du mieux que l"™on peut et on s"™informe avec les outils actuels.

H. - Comment vos enfants se sont-ils adaptés à votre situation ?
M.V. - Ils ont été responsables très tôt. Ils guidaient leurs parents. C"™est une responsabilité et une confiance mutuelles face aux difficultés quotidiennes. Ils ont vécu comme tous les enfants. Pendant la journée ils avaient leurs activités scolaires et autres. Le soir, avec l"™aide de l"™informatique et de la loupe nous les aidions pour lire. Nous les avons soutenus pour leurs devoirs. L"™ordinateur et internet représentent un progrès essentiel qui a facilité la vie de nos enfants : dialoguer et partager les expériences de chacun.

H. - Que pensez-vous du regard des autres sur le handicap ?
M.V. - Cela dépend, certaines personnes connaissent les difficultés liées au handicap alors que d"™autres l"™ignorent et ne veulent pas voir les problèmes auxquels nous sommes confrontés au quotidien : percer un trou pour placer une étagère bien droite, se déplacer avec des objets encombrants. Une voiture, c"™est aussi l"™indépendance pour se déplacer, surtout pour les enfants de couples non-voyants qui ont à vivre avec le handicap des parents.

Propos recueillis par Karine Miceli. Photo Martine Vernhes


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