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L’art de tirer le meilleur du pire

Suite à un accident de travail, Jacques, quarante-neuf ans, est devenu paraplégique. Il se déplace en fauteuil roulant depuis 1988. Cependant, il ne se sent nullement détruit par un destin malheureux et s’efforce d’affronter le quotidien par une attitude positive. Du monde valide, il a gardé intactes des notions de liberté, de combativité et d’espérance.

Question : Vivez-vous en institution ?

Non, pas du tout, je vis chez moi, normalement, en faisant du sport.

Q : Vos impressions sur l’accessibilité ?

Vous voulez parler de l’accessibilité au quotidien ? Ça avance doucement, des choses se font, les municipalités font ou défont, ça dépend des fois. Il y a des revêtements neufs qui se font, avec ce qu’il faut, il y en a d’autres qui se font avec moins que ce qu’il faut, mais ça avance. Tout le monde se bat gentiment, sans vouloir forcer les choses ; il faut expliquer aux gens, éduquer les gens, c’est-à -dire éduquer à l’école les enfants, et à partir de ce moment-là , ça ira tout seul. Moi, personnellement, je suis relativement mobile, donc les petits problèmes d’accessibilité qu’il peut y avoir au niveau des trottoirs ou de quoi que ce soit ne me posent pas énormément de problèmes. Je me véhicule moi-même, mais quand il y a des marches et qu’on ne peut pas y aller, ça c’est sà »r, on n’y va pas ou alors on se débrouille d’envoyer quelqu’un ou on fait descendre la personne jusqu’à nous. Mais, là où le souci se crée, c’est dans les administrations qui normalement sont dites accessibles à tout le monde et qui parfois ne le sont pas. C’est vrai qu’ici tout est plat, dans d’autres endroits aussi et dans d’autres encore, c’est en cours de rénovation. Il y a des impairs qui se font : on passe en biais les portes et plein de petits trucs qui ont été oubliés, donc c’est à nous, aux associations, aux gens de demander et d’expliquer pourquoi il y a un besoin de ça. Mais il ne faut pas dire : "On veut ça, pour ça !" Il faut expliquer et donc, là , ça ira bien... Comme les places, les places qui sont " handi " réservées aux personnes handicapées, il n’y a qu’un seul sigle qui représente les personnes handi, c’est ce fameux fauteuil avec quelqu’un de schématique. Mais là -dedans, ça englobe tout : les mal-voyants, les personnes qui marchent, mais qui ont eu droit à leur carte d’invalidité (invalides à 80%) et qui se déplacent, alors ceux qui sont valides confondent tout. Quand ils voient une personne qui prend cette place-là et qui sort en marchant normalement, ils n’y comprennent plus rien, et donc ils se garent à côté et ça ne les dérange pas. Si c’est quelqu’un en fauteuil comme moi et s’il se gare à côté de moi, je ne peux plus ouvrir la portière. C’est pour ça que ces places-là , il faut les mettre sur les extrémités, de manière à ce que personne ne puisse venir se garer à côté.

Q : Votre regard sur les personnes valides ?

Le même regard que je portais avant, puisque j’étais valide, la même chose, un peu plus bas, tout simplement. Mais ça n’a pas changé, le monde ne change pas, il existe et ce ne sont pas les valides qui vont le transformer pour qu’il soit accessible aux handicapés mais plutôt les handicapés qui vont s’insérer dans le monde des valides, or on fait l’inverse : c’est normal que les personnes valides soient parfois récalcitrantes ! Vous vous trouvez dans les supermarchés et vous trouvez quoi ? Vous trouvez des caisses où il y a marqué quoi ? "Prioritaire" ! Mais prioritaire en quoi ? Quand on est assis ? Qu’on marque plutôt "Caisse accessible", mais pas "Prioritaire" et là , ça ira beaucoup mieux. Les deux mondes, s’il y a deux mondes, ne s’en porteront que mieux. La personne qui travaille, qui a fait quarante heures, qui s’est tapée trois heures d’embouteillage, qui fait la queue, qui est devant cette caisse-là et qui voit un gars ou un vieux en fauteuil ou un autre qui lui passe devant en disant : "Mais, moi je suis prioritaire !", alors que lui, il n’a rien glandé de la journée, en quoi est-il prioritaire ? S’il était pressé, il fallait qu’il vienne avant !

Q : Et le regard des valides sur vous ?

Et bien là , c’est un miroir. Le regard des valides, c’est ce vous êtes en train de faire. Vous me regardez d’en haut vers en bas, puisque je suis plus bas et moi l’inverse. Mais, si moi, je me regarde et que je vois une personne en fauteuil, ceux qui vont me regarder, verront ce que je vois moi-même, c’est à dire une personne en fauteuil. C’est l’image qu’on se fait de soi-même que les autres voient, c’est tout. Si vous vous baladez à poil, on vous verra à poil ; si vous êtes habillé, on vous voit habillé.

Q : Avez-vous le sentiment d’être exclu par la société ?

Pas du tout ! Je rentre dans la société, là -même où les choses peuvent être difficiles. Là où il y a besoin de créer, on crée, on fait. Donc la société n’exclut personne, ce sont les gens qui s’excluent de la société. La société, elle est prête à inclure tout le monde, aveugles, mal voyants, méchants, gentils, tout le monde... Le tout, c’est que tous ces gens veuillent bien entrer dans le monde de la société et non pas vivre dans la société, tout en restant en marge de celle-ci. C’est tout !

Q : Avez-vous un message à faire passer ?

Pour résumer, disons qu’il y a plus de chance qu’une personne valide se retrouve un jour dans notre position plutôt que l’inverse. Encore un message : que les deux mondes (mais ce ne sont pas deux mondes, en vérité !) s’accordent bien, avec le minimum de distinction, que ça se coordonne bien, que l’on parle le même langage ! Le plus souvent, s’il y a des blocages, c’est parce qu’il y a beaucoup d’associations, (il y a l’APF, il y a tout ça...). Les gens en sont restés à une idée ancienne du fauteuil. Mais le fauteuil a évolué. Donc, il faut que tout ça fonctionne ensemble. Cela va prendre du temps, mais ça va venir. Si tout le monde fait un effort, ça va aller tout seul, parce que ce que l’on fait pour les fauteuils, ça sert à tout le monde : les personnes âgées, les poussettes, ceux qui veulent rentrer leur bagages, dans les magasins, tout ça... Donc, c’est une question de volonté politique. À partir du moment où on trouve deux personnes qui ont la même volonté, même si elles ne tiennent pas le même discours, elles arriveront à s’accorder.

Q : Avez-vous une vie affective, sentimentale ?

Oui. Je suis marié, j’ai deux enfants que j’ai eu le bonheur d’avoir avant mon accident et là , c’est pareil, c’est vous qui vous créez votre vie sentimentale. Si vous voulez vous exclure, parce que vous vous dites que vous êtes affaibli, les gens verront une personne affaiblie. Cela n’empêche pas que vous puissiez regarder les filles, les draguer, les faire danser, pour ce qui est de mon cas. Pour d’autres (chacun voit midi à sa porte), ils s’arrangeront avec ce qu’ils ont : un borgne, il s’arrangera avec un œil ; un unijambiste, avec la jambe qui lui reste ; s’il lui manque les deux jambes, il s’arrangera autrement... Chacun doit se débrouiller avec ce qu’il a. Je suis persuadé qu’il y a des valides qui sont bien plus invalides que nous, qui sommes dans un fauteuil...

Propos recueillis par Joseph Ouazana au parc Chanot, lors du salon Automatic Méditerranée, décembre 2004


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